Comment obtenir le dossier médical

I. Un droit à communication reconnu au malade et à ses ayants droit
Le droit à la communication des documents administratifs est un droit relativement ancien, reconnu pour favoriser la transparence de l’action administrative. En effet, la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 qui a, pour la première fois, consacré ce droit, avait pour objet de mettre un terme, de manière générale, à la pratique du secret dans l’action administrative.
S’agissant des documents médicaux et des établissements hospitaliers, ce droit à communication présente un intérêt particulier eu égard à l’objet des documents détenus par les établissements hospitaliers et à sa nécessaire conciliation avec le secret médical.
C’est pourquoi, si ce droit spécifique, relatif au dossier médical, est rappelé par les articles L. 311-1 et L. 311-6 du code des relations entre le public et l’administration, il fait l’objet de dispositions spéciales au sein du code de la santé publique. Aussi, c’est du côté de ce code qu’il convient de chercher qui peut solliciter la communication d’un dossier médical et comment.
A la lecture du code, il apparaît que deux types de personnes peuvent solliciter la communication d’un dossier médical.
D’une part, et assez logiquement, la personne qui a fait l’objet des examens médicaux ou de l’hospitalisation peut solliciter la communication de son dossier (article L. 1111-7 du code de la santé publique). Elle peut la demander, soit directement (seule ou avec un avocat), soit par l’intermédiaire d’un médecin qu’elle mandate à cet effet.
D’autre part, les documents médicaux peuvent également être demandés par les ayants droit d’une personne (article L. 1110-4 du code de la santé publique) à trois conditions : tout d’abord, que cette personne soit décédée, ensuite, que ces documents soient nécessaires pour connaître les causes du décès de la personne, pour défendre la mémoire du défunt ou pour faire valoir ses droits et, enfin, que la personne décédée ne se soit pas opposée, avant son décès, à une telle communication.
En dehors de ces hypothèses, il n’est en principe pas possible de solliciter la communication d’un dossier médical.
II. Quels documents peuvent être demandés ?
Le fait d’avoir la qualité pour solliciter la communication d’un dossier médical ne signifie pas nécessairement que tous les documents existant peuvent être demandés. Encore faut-il qu’ils présentent un caractère communicable et qu’ils soient effectivement présents au dossier.
Sur ce point, l’article R. 1111-2 du code de la santé publique contient une liste des documents qui doivent toujours être présents au dossier dans les établissements de santé tant publics que privés. Cette liste, assez longue, comprend notamment les prescriptions, les examens, les comptes rendus opératoires, les dossiers de soins infirmiers, etc.
Tous les documents présents au dossier sont donc communicables, à l’exception des « informations mentionnant qu’elles ont été recueillies auprès de tiers n’intervenant pas dans la prise en charge thérapeutique ou concernant de tels tiers ».
Toutefois, deux précisions doivent être faites à ce stade, l’une, générale, et l’autre, relative à l’hypothèse dans laquelle la demande de communication porte sur le dossier d’une personne décédée.
D’une part, il doit être rappelé que le droit à communication porte sur tous les résultats d’examen et notamment les radiographies. En effet, malgré le format particulier de ces documents, une copie peut en être demandée (voir, par exemple, en ce sens : CADA, 8 février 2007, Assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP), hôpital d’enfants Armand-Trousseau, avis n° 20070859).
Cette solution est parfaitement logique mais méritait d’être soulignée.
D’autre part, s’agissant des personnes décédées dont les ayants droit demandent le dossier médical, se pose la question du caractère communicable d’une autopsie médicale réalisée en dehors de toute enquête judiciaire (article L. 1211-2 du code de la santé publique).
En effet, il arrive parfois que l’établissement de santé décide d’éclaircir les causes du décès d’une personne dans l’hypothèse où ces dernières sont obscures. Et ce, sans que cette autopsie ait été décidée dans le cadre d’une enquête judiciaire. L’autopsie donne alors lieu à un compte-rendu écrit, versé au dossier du patient.
Eu égard à sa nature particulière, un doute aurait pu exister quant au caractère communicable ou non de ce document.
Toutefois, eu égard à son objet, à savoir, permettre de connaître les causes du décès de l’intéressé, la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) a estimé qu’il était communicable aux ayants droit de la personne décédée. Et ce, même si c’est un expert extérieur à l’établissement qui a été missionné pour procéder à cette autopsie (CADA, 22 novembre 2012, Centre hospitalier de Béziers, n° 20123718).
Cet élément crucial pour la compréhension du décès peut donc être demandé par les ayants droit.
III. Quels réagir en cas de refus de communication du dossier médical ?
En vertu de l’article L. 1111-7 du code de la santé publique, l’établissement de santé doit en principe communiquer le dossier dans les 8 jours de la demande (ce délai est toutefois porté à 2 mois lorsque les documents datent de plus de 5 ans ou lorsque la commission départementale des soins psychiatriques est saisie).
De la sorte, à défaut de réponse de l’hôpital dans les 8 jours, une décision implicite de refus nait. Par sécurité, la demande de communication doit bien-entendu être adressée par courrier recommandé avec accusé de réception afin de donner date certaine à cette demande.
Dans la pratique, il est très fréquent que les établissements hospitaliers ne respectent pas ce délai de 8 jours. En effet, pour des raisons pratiques et de personnel, le délai est généralement plus long (parfois beaucoup plus long).
Néanmoins, dès la naissance de cette décision de refus, il est possible de saisir la CADA pour qu’elle rende un avis sur le caractère communicable des documents. Son intervention est souvent utile car, dans le cadre de l’instruction de la saisine, la CADA demande à l’établissement de santé les raisons du refus opposé à la demande (ce qui peut avoir pour effet de « réveiller » les services chargés de la communication du dossier au sein de l’hôpital).
La CADA rendra alors un avis non contraignant mais qui sera néanmoins très incitatif pour l’établissement. En effet, si l’hôpital ne communique pas le dossier dans les deux mois de la saisine de la CADA, une nouvelle décision implicite de refus confirmative naîtra de son silence et pourra, cette fois, être déférée au tribunal administratif.
Or, le tribunal administratif dispose, à la différence de la CADA, de pouvoirs d’injonction contraignants et pourra condamner l’établissement hospitalier au versement d’une somme au titre des frais d’avocats exposés par le demandeur.
Dès lors, et dans la mesure où la CADA et les tribunaux administratifs ont très généralement la même interprétation quant au caractère communicable des documents, l’établissement hospitalier aura tout intérêt à respecter l’avis de la CADA, afin d’éviter une procédure judiciaire.
Toutefois, s’il persiste, la saisine du tribunal administratif deviendra alors nécessaire.